
PROLOGUE
Décoration du prologue. L »ouverture du théâtre présente de front aux yeux des spectateurs une montagne, dont les sommets inégaux, s »élevant les uns sur les autres, portent le faîte jusque dans les nues. Le pied de cette montagne est percé à jour par une grotte profonde qui laise voir la mer en éloignement. Les deux côtés du théâtre sont occupés par une forêt d »arbres touffus et entrelacés les uns dans les autres. Sur un des sommets de la montagne paraît Melpomène, le muse de la tragédie, et à l »opposite dans le ciel, on voit le soleil s »avancer dans un char tout lumineux, tiré par les quatre chevaux qu »Ovide lui donne.
Le Soleil, Melpomène.
Melpomène
Arrête un peu ta course impétueuse:
Mon théâtre, Soleil, mérite bien tes yeux;
Tu n »en vis jamais en ces lieux
La pompe plus majestueuse:
J »ai réuni, pour la faire admirer,
Tout ce qu »ont de plus beau la France et l »Italie;
De tous leurs arts mes sœurs l »ont embellie:
Prête-moi tes rayons pour la mieux éclairer.
Daigne à tant de beautés, par ta propre lumière,
Donner un parfait agrément,
Et rends cette merveille entière
En lui servant toi-même d »ornement.
Le Soleil
Charmante muse de la scène,
Chère et divine Melpomène,
Tu sais de mon destin l »inviolable loi:
Je donne l »âme à toutes choses,
Je fais agir toutes les causes;
Mais quand je puis le plus, je suis le moins à moi;
Par une puissance plus forte
Le char que je conduis m »emporte:
Chaque jour sans repos doit et naître et mourir.
J »en suis esclave alors que j »y préside;
Et ce frein que je tiens aux chevaux que je guide
Ne règle que leur route, et les laisse courir.