Pamphlet virulent dirigé contre la société anglaise d’Henri VIII et construction imaginaire proposant en contrepoint l’image d’une société idéale, L’Utopie, publiée en 1516, est la célèbre contribution de l’humaniste chrétien Thomas More au débat philosophique sur les finalités du politique. Ami d’Érasme, dénonçant avec lui les égarements de l’Église et de l’État, More espère, en dressant le tableau de la cité idéale, rappeler à chacun, gouvernants ou gouvernés, la voie du Bien commun. L’inégalité des richesses et l’intolérance religieuse sont les principales cibles de sa critique.
À quoi bon l’utopie ? À force de faire des concessions à l’ordre des choses sous prétexte de réalisme et d’efficacité la réflexion politique finit par perdre toute référence à l’idéal et aux valeurs. Une ‘utopie’ (le mot inventé par More signifie, par ses racines grecques, ‘lieu qui n’existe pas’) n’est donc pas une attitude naïve : symptôme d’une crise morale, elle est aussi et surtout une tentative pour renvoyer une société à ce qu’elle attend d’elle-même. Un rêve, oui, mais pour affermir la volonté politique.
Circa l’autore
Thomas More, latinisé en Thomas Morus (7 février 1478, Londres – 6 juillet 1535, Londres), est un chanoine, juriste, historien, philosophe, humaniste, théologien et homme politique anglais. Grand ami d’Érasme, érudit, philanthrope, il participe pleinement au renouveau de la pensée qui caractérise cette époque, ainsi qu’à l’humanisme, dont il est le plus illustre représentant anglais.
Nommé « Ambassadeur extraordinaire », puis « Chancelier du roi » par Henri VIII, il désavoue le divorce du Roi et refuse de cautionner le schisme avec Rome : il démissionne de sa charge en 1532. Devant la persistance de son attitude, il est emprisonné, puis décapité comme « traître ».
Béatifié le 29 décembre par l’Église catholique en 1886 sur ordre du pape Léon XIII, Thomas More est canonisé – saint Thomas More – le 19 mai en 1935 par le pape Pie XI.