Extraits de la préface de Jacques Catteau (Éditions L’Âge d’homme):
Avec Oblomov (du russe «oblom», «cassure», ou «oblomok », «tesson», «débris»), Ivan Alexandrovitch Gontcharov (1812-1891), l’un des fondateurs du roman réaliste russe, façonne un personnage mythique de la littérature et un caractere connu de tous les écoliers depuis le début du siecle. A l’opposé de l’Onéguine de Pouchkine ou du Petchorine de Lermontov, Oblomov ne se bat pas, ne voyage pas, ne monte pas et ne séduit pas. Son arme c’est la robe de chambre douillette. Ses péchés? L’alcool et surtout la gourmandise. Paru en 1859, deux ans avant que le tsar n’abolisse le servage en Russie, Oblomov est un roman délicieusement moderne, nous narrant avec humour la disparition des petits propriétaires terriens dépassés par la nouvelle élite des hommes d’affaire.
Le personnage d’Oblomov est drôle et terrifiant. Cet homme qui n’a pas quarante ans est un propriétaire terrien installé a Saint-Petersbourg, loin de ses terres et des quelques centaines d’âmes qui lui appartiennent. Son domaine va mal et il devrait se rendre dans son pays, en Oblomovska – le pays de cocagne ou les parents et les grands-parents du héros coulaient des jours tranquilles et dont les habitants priaient Dieu pour que le lendemain soit semblable aux jours passés… Son propriétaire voudrait d’autre part qu’il déménage pour récupérer son appartement et lui envoie de pressants courriers. Qu’importent les lettres du propriétaire et les mauvaises nouvelles du domaine, il sera toujours temps d’y répondre tantôt… Ou demain. Enveloppé dans sa vieille robe de chambre, Oblomov ne quitte plus, sauf en reve, son domicile poussiéreux. Il passe, paisible et reveur, du lit au fauteuil pour retourner insensiblement au premier quand il se sent épuisé. L’agitation le fatigue. Il vit chez lui en paix, au rythme des jours qui fuient, marqués par son inactivité la plus totale qui le fait toujours tout ajourner…
Attention, la présente édition – Édition Librairie Didier et Cie Paris 1877 – reprise du site Gallica, ne correspond pas au texte intégral, apparemment (ainsi, la version intégrale traduite par Luba Jurgensen et parue chez L’Âge d’homme en 1988, est un livre de 475 pages…)